Pensées noires

Il faut vraiment le vivre pour s'en rendre compte, mais perdre la vue est une chose tellement horrible que les mots seuls ne suffisent pas pour décrire l'état dans lequel on peut se trouver. Une crainte s'empare de nous à chaque pas que nous faisons. Car n'avoir aucun moyen de savoir ce qu'il se passe autour de nous peut réveiller une peur si intense que seuls les hommes armés du plus grand courage peuvent encore la supporter.

Heureusement pour elle, les Elfes n'ont de nature pas le besoin absolu de se nourrir. Enfin, si, ils se nourrissent mais beaucoup moins que les autres créatures.
Alors Haru ne s'inquiétait pas à ce sujet. Elle continuait donc de marcher, marcher comme si sa vie en dépendait. Et même si elle ne savait nullement où aller, elle ne s'arrêtait à aucun moment.

Elle était perdue dans ses pensées ; ce qui, sans doute, l'empêcha de l'entendre s'approcher. Elle réfléchissait à ce qu'elle allait bien pouvoir faire de sa vie à présent qu'elle ne servait plus à l'armée et que son aimé l'avait abandonnée.
À un moment, la possibilité de mettre fin à ses jours lui était passée par la tête. Car maintenant qu'elle n'avait plus rien à faire, mieux vallait disparaitre... sans laisser de traces...
Mais cette idée lui était bien trop difficile à supporter, non... elle le savait... elle n'avait pas envie de mourir...

Ce n'est qu'après plusieurs longues... très longues minutes qu'elle s'en rendit compte...
Elle n'était pas seule...

Un garçon marchait. Vers où ? Même lui l'ignorait. Tout ce qu'il savait, c'était qu'il voulait fuir les derniers souvenirs qu'il possédait. Ne se souvenir de rien... Oublier cette honte. La lame à la main, il marchait toujours tout droit.
Du sang coulait et tombait doucement sur l'herbe de la forêt, tel la neige en hiver. Un peu plus loin, un cadavre jonchait le sol, gisant dans une marre rouge sinistre. Le corps d'un jeune Elfe égorgé qui se vidait de son sang... cette image était si... agréable ? Oui, elle procurait un plaisir intense. Tourmenté par ces pensées obscures, il s'arrêta.

Il souffrait toujours, bien évidement. Mais le fait de tuer lui avait soulagé une bonne partie de ses blessures. C'était évident, il avait besoin de tuer pour guérir. À ces pensées, il éclata d'un grand rire, un rire dément... La lame dégoulinante du liquide rouge tintait alors qu'il la faisait trembler entre des doigts. Il la lâcha, sans le faire exprès, et continua à rire. Puis, le rire s'adoucit petit à petit, pour devenir un simple ricanement. Le Démon se pencha, ramassa son arme et se remit en route.

Il était heureux. Il aimait la vie comme elle était. Tout était parfait. Rien de troublerait ses pensées. Et personne ne pourrait gâcher son monde parfait, personne. Tout le monde mourra. Il avait entendu quelqu'un. Cette personne allait bientôt mourir. Alors pourquoi attendre ? Sans crier gare, il sortit des buissons et s'approcha d'elle.
C'était une jeune femme, une Elfe. Elle portait un bandeau sur les yeux, ce qui était assez bizarre. Elle avait l'air perdue, et triste à la fois... Parfait, il allait pouvoir abréger ses souffrances. Se tenant derrière elle, un sourire aux lèvres, la lame tachée de sang, il se mit à parler, ce qui eut l'air de la surprendre étant donné qu'elle ne l'avait pas entendu arriver.

-Dis, tu as l'air perdue... Veux-tu que je t'aide ?

Comment ? De l'aide ? Cette personne lui proposait son aide...et pourtant...les ondes qu'il émettait étaient...tellement négatives.
Se moquait-il d'elle ? Ou était-elle simplement devenue folle ? Non...impossible...une telle sensation d'horreur...ce ne pouvait être le fruit de son imagination...

- Je ne crois pas que ce sera nécessaire, merci !

Elle avait prononcé ces mot avec dureté et fermeté, ainsi peut-être aurait-il compris qu'il aurait mieux fait de la laisser tranquille. Mais...ses paroles n'eurent aucun effet sur l'inconnu. Elle sentait à présent qu'il s'approchait d'elle, lentement...très lentement...sans doute appréciant le fait de faire durer ce moment si tendu encore plus longtemps.

Elle ne put s'empêcher de reculer de quelques pas...c'était plus fort qu'elle, son corps entier ressentait le besoin de fuir, immédiatement. Pourtant...qu'elle se souvienne, elle n'avait jamais eu aussi peur de quelqu'un auparavant.

Non, pourquoi avait-elle peur ? Parce qu'elle était aveugle ? Non, ce n'était pas ça...ce type...dégageait tellement d'énergie que c'en était effrayant...
À présent elle n'osait plus bouger d'un cil, chose qui ne lui était jamais arrivée, et attendait avec angoisse le moment où une lame allait lui transpercer la chair.

*Merde...*

Kay, le sourire aux lèvres, s'étant approché de la jeune fille, avait commencé à lui tourner autour, comme s'il était en train d'inspecter une oeuvre d'art. Cette jeune femme était... différente des autres. Enfin, c'était ce qu'il trouvait, même s'il ne savait absolument pas pourquoi. En tout cas, il sentait qu'il la mettait mal à l'aise, et il aimait ça. Il fit quelques tour autour d'elle, puis s'approcha et s'arrêta juste devant celle-ci. D'un air amusé, il se pencha en avant, les bras derrière son dos, comme un petit garçon qui essayait de regarder en dessous de quelque chose. Il avait laissé tomber son arme dans l'herbe, et approcha ses mains du visage de la jeune Elfe.

-Ce bandeau... Pourquoi cacher ton visage ? Tu n'as pas l'air vilaine pourtant !

D'un coup, il arracha le tissu des yeux de la jeune fille, ce qui la surpris et sembla l'irriter car elle ne put s'empêcher de froncer les sourcils, l'air colérique. Le garçon fit un pas en arrière en rigolant. Il la trouvait amusante, et il avait envie de continuer de s'amuser avec elle. C'est pourquoi il lâcha, imitant la voix d'un jeune garçon contrarié :

-Eeh ben, pourquoi gâcher une si jolie chose en te crispant comme ça ?

Il savait qu'il l'énervait, et il trouvait ce jeu très drôle. Il était seul avec elle. Personne ne pouvait la défendre. Et elle ? Elle ne semblait pas en état pour, il le voyait dans ses yeux. Elle avait perdu la vue, la pauvre. Le Démon la contourna à nouveau, puis s'approcha d'elle par derrière. C'est alors qu'il fit quelque chose d'innatendu. Il la prit dans ses bras. Il sentait la chaleur à son contact, c'était vraiment agréable. Il ricana à son oreille et resserra son étreinte.

-Héhé, au fait, je me demandais... si ces deux magnifiques choses étaient réelles !

Sans aucune gène, toujours en rigolant, il porta ses mains à la poitrine de la jeune femme. Satisfait, il se dégagea d'elle avant qu'elle n'ait pu répliquer, et ria de plus belle. Il ramassa son arme à terre sans bruit, afin qu'elle pense qu'il était toujours désarmé, et la posa d'un air nonchalant sur son épaule.

-Waah, c'est bien des vrais ! Eh bien, ma jolie, tu as été gâtée, toi ! Enfin... Ca m'attriste vraiment, mais tu dois savoir que toutes les bonnes choses ont une fin, pas vrai ?

Il avait dit ça en regardant sa lame, et s'approcha dangereusement d'elle, pour se retrouver tout près, son visage à la hauteur du sien. Du bout de ses doigts, il effleura ses lèvres, attendant un signe, une réaction de sa part. Son rire, doux à présent, était la seule chose qui perturbait se silence soudain...

Détraqué...ce type...était complètement détraqué, et cela semblait même le plaire. Il avait osé lui toucher les seins et cela sans même aucune hésitations ! De plus, il disait à présent qu'il allait en finir avec sa vie alors qu'elle ne lui avait strictement rien fait !

Et donc...? Qu'allait-il lui arriver à présent ? Alors c'était fini ? Après toutes les aventures qu'elle avait vécu ?

*Hors de question !*

Mais, que pouvait-elle faire ? Une si insignifiante créature...maintenant qu'elle n'y voyait plus, elle était bonne pour la poubelle, si on puit dire...

Avant, elle était maitre dans l'art du lancé de couteaux; aucune cibles ne lui échappaient. Mais à présent ? Rien n'était plus pareil, tout était devenu tellement compliqué, son existence même était devedue une chose difficile à supporter.

Mais...elle survivait...elle endurait les souffrances de ses erreurs passées. Et ce n'était pas pour que sa piètre vie se termine dans de telles conditions. Non, c'était trop bête...

Elle porta donc sa main à sa hanche, et fut choqué de se souvenir que sa ceinture en cuir où étaient accrochés ses poignards se trouvait chez M. Du Moulin, à Uguisu. Elle se souvenait les avoir oubliés chez lui dans la précipitation.

*Mais quelle pauvre imbécile...*

Alors elle baissa la tête tout en se mettant à reculer. Un petit sourire apparut alors sur son visage désespéré et elle chuchota à l'étranger:

- Fou...que comptes-tu faire, là...que tireras-tu de ma si insignifiante mort ? Va-t-en, pauvre malheureux !

Fou ? Malheureux ? Ces mots tournoyaient dans sa tête comme des briques emportées par une trop forte tornade, et qui martelaient son crâne tellement douloureusement... Il n'était pas fou. Il était tout ce qui a de plus normal. Il tuait pour survire. Et alors ? Tout le monde fait ça ! Sauf que lui ne se nourrissait pas des cadavres, non... En réalité, tuer lui apportait quelque chose de plus... différent. C'était comme... l'air qu'on avait besoin de respirer pour se sentir bien et sans lequel on allait inévitablement mourir. Oui, c'était cela. C'était normal. Il n'était pas fou. Ni malheureux d'allieurs. Il était parfaitement heureux comme il était. Comment osait-elle prétendre le contraire, elle, qui semblait avoir tout perdu ? C'était elle, la pauvre malheureuse !

-Regarde-toi d'abord avant de juger les autres !

Il avait dit ça d'un air contrarié, prononcé ces mots comme une sorte de grognement rauque. Il était en colère. Pour une simple phrase ? Sans doute plus à cause de tout ce qui lui était arrivé dernièrement. Il en avait assez qu'on lui manquait de respect et qu'on lui tienne tête. Pour lui, cette simple pharse qu'avait prononcé l'Elfe s'était transformée en une véritable insulte. Il ne bougeait pas, la tête baissée, il ne disait plus un mot. Puis, il s'approcha et se plaça juste devant elle, la fixant dans ses yeux clairs.

-Je ne m'en irai pas, petite peste !

Puis, la giffle était partie d'un coup. Il avait l'impression que son corps avait réagit tout seul. Il l'avait frappée, et elle était tombée à terre, à ses pieds. Elle avait l'air tellement... impuissante. Oui, elle était tombée encore plus bas que lui, et c'était bien fait pour elle. C'est alors qu'il partit dans un grand fou rire. Il n'entendait même plus ce qu'elle faisait tellement il riait. Il riait, encore et encore...
Finalement, il se calma, et se tourna vers elle. Ses yeux avaient virés au rouge, et son sourire avait l'air encore plus fou qu'il ne l'était habituellement. D'une voix enrouée, changée, il parla, tout en faisait habilement tourner son arme entre des doigts.

-Je... tu... vas... CREVER !!!

Elle avait peur, tellement peur ! Et elle ne voulait pas mourir ! Elle avait tellement peur de mourir...

Elle avait senti plusieurs coups d'épée lui déchirer la chair, et du sang rouge vif lui coulait à présent sur le visage et sur différents autres endroits de son corps...quel gâchi...

Elle ne pouvait ni se battre, ni fuir. La seule chose qu'elle pouvait faire encore était d'essayer de s'accrocher désespérément à la vie du mieux qu'elle le pouvait.

Alors qu'elle restait alongée au sol, imobile, les yeux clos, elle murmura faiblement à l'ennemi...

- Tu vas me tuer...et alors ? Crois-tu réellement que tu te sentiras vainqueur, face à moi qui suis si faible ? Tu auras beau gagner, il arrivera un jour où tu tomberas, crois-moi, sur quelqu'un de plus puissant que toi. Et au final...tu perdras, je te l'assure...tu ne seras rien d'autre qu'un pauvre...pauvre perdant...

Et là-dessus, elle perdit connaissance...

Le Démon riait, il riait tout en écorchant le corps de sa victime. A voir celà, on comprenait qu'il avait envie de la faire souffrir. Sauf que celle-ci, incontiente, devais être bien loin de sentir une quelconque douleur à ce moment. Concient de ce fait, le garçon décida d'un finir. Il y eut un coup, puis plus rien. Une flaque de sang se forma au sol, s'agrandissant petit à petit. Soudain, le corps inanimé de la jeune Elfe fut soulevé du sol par deux bras de jeune homme, et emmené légèrement à l'écart. Elle respirait, difficilement mais respirait.

Ce n'était pas possible. Pas encore... La respiration bruyante, sacadée, Kay se tenait le bras. Sur celui-ci, taché de sang, une profonde entaille. Son sang dégoulinait et venait se mêler à celui d'Haru, à ses pieds. Il était retombé à genoux. Le regard surpris et intrigué, il leva la tête pour appercevoir le nouveau venu.

Tenant Haru dans ses bras, bien serrée contre lui, Inki, armé de sa lance dans son autre main (Haru étant très petite, il peut très bien la tenir avec un seul bras), faisait face au Démon. L'air déterminé, il fixait celui-ci avec une expression de dégoût. Les deux garçons se regardèrent pendant un moment, l'un se demandant ce qu'il voulait à son amie, l'autre d'où il sortait. Enfin, Inki coucha délicatement la jeune Elfe au sol, et s'arma à nouveau de son bâton surmonté d'une lame noire. Il se serait bien exprimé calmement pour parler à son opposant, mais c'était impossible quand on s'appelait Inki Yoru. C'est donc mi-calmement, mi-colériquement qu'il s'adressa à Kay.

-Eh toi là ! Ca va pas de s'attaquer comme ça aux jeunes filles ?? Tu veux mon poing dans ta gueule ?

L'autre ne répondit pas. Il semblait trop surpris, désemparé et abattu pour répliquer quelque chose au Valkyrie.

-Genre... c'est pas mon poing que tu vas te ramasser... c'est ma lame !

D'un coup, le Valkyrie bondit, utilisant ses ailes pour atterrir du côté le plus imprévisible du Démon et le frapper de sa lance. Seulement voilà, la lance se planta simplement... dans le sol.

-Hein ?

Où était-il passé ? Inki n'eut même pas le temps de se poser cette question qu'un ricanement se fit entendre derrière lui. Le garçon fit volte-face, et aperçu le Démon appuyé de côté contre un arbre en rigolant, reposant sur son bras. Celui-ci semblait très à l'aise, et ne le regardait même pas. Il continuait à rire doucement, et posa sa tête contre l'arbre comme pour s'y reposer. Inki était sérieusement en train de se poser des questions sur cet individu. Il semblait... complètement détraqué, à rire tout seul. Enfin, il y avait plus important. Le Valkyrie retourna se poser près d'Haru, et lui pris la main, comme il l'avait fait autrefois. Il ne lui en voulait plus du tout à présent. C'était du passé. Elle devait avoir ses raisons.

-Ha... Haru ? Tu m'entends ?

Il continuait à rire, rire doucement, comme pour lui même. En réalité, il ne savait pas lui-même pourquoi il riait. Ca devait venir de lui. Jamais il ne s'était senti si pitoyable. Lui, qui avait massacré des centaines de Démons, exterminé une quantité incalculable de gens. Lui, qui était resté enfermé dans sa cellule plus de deux cent ans. Était-il devenu pitoyable à ce point ? Sa vie aurait-elle été complètement... gâchée ? Sans doutes. Il ne méritait rien. Il méritait la mort, lui aussi. Et ça le faisait rire...

-Tu peux toujours essayer, elle ne se réveillera pas.

D'un geste vif, le Valkyrie se tourna vers lui. Il le dévisagea un instant d'un air contrarié, puis se leva pour lui faire face. Le Démon avait arrêté de rigoler. Toujours appuyé contre son arbre, il regardait le jeune homme d'un air à la fois mauvais et indifférent. Ils n'avaient rien à se dire. Ils se contentaient de se regarder, l'un avec colère, l'autre indifférence. Ils commençaient l'un comme l'autre à trouver ce silence long.

-As-tu envie de me tuer ?

Cette phrase eut un effet d’impact sur Inki. Le tuer ? Lui, qui avait essayé de tuer Haru, et qui semblait avoir de l’expérience en la matière ? Vouloir le tuer, lui ? Mais pourquoi cette idée ne lui était-elle pas venue à l’esprit plus tôt ? Le Valkyrie fronça les sourcils et arma sa lance.

-Je vais te tuer...

Le Démon sourit. Il aimait ça, tourmenter les gens, les faire dire exactement ce que lui voulait.

-Bien. Décidément, tu ne vaux pas mieux qu’elle...

Avant qu’un des deux n’eut le temps de prononcer un mot, le Valkyrie était déjà sur son adversaire. Il brandit sa lance et la planta avec force dans l’arbre, juste à côté de la tête de Kay. Celui-ci ne broncha pas. Le garçon empoigna le Démon par le col de son T-shirt et le souleva à quelques centimètres du sol, ce qui n’était pas très difficile vu la différence de taille. Il avait une folle envie de lui faire payer pour tous ses crimes. Ils se regardaient. Ce type devait se foutre de lui. Silencieux, il se laissait faire, le fixait avait un grand sourire amical. Inki ne put le supporter plus longtemps. Il baissa la tête et laissa tomber Kay par terre, détacha son arme de l’arbre dans lequel elle était plantée, puis se détourna de lui et se dirigea vers l’endroit où il avait laissé Haru inconsciente.

-Tu ne vaux même pas la peine que je te tue.

Ce type le dégoûtait, vraiment. Mieux vaut qu’il reste loin de lui, celui-là. Mais avant d’avoir pu se pencher vers la jeune Elfe pour l’emporter plus loin, il sentit une pression venant de côté et se retrouva projeté à terre. Confus, il releva la tête pour comprendre ce qui venait de se passer.

-Désolé, mais je ne supporte pas les travaux inachevés !

Le Démon était passé à côté de lui et se dirigeait maintenant droit vers la blessée. Emplis d’horreur, le Valkyrie se releva rapidement et courut le plus vite qu’il put pour venir à son secours. Il y eut un coup...

-HARU !!!

Il y eut une gerbe de sang... Puis, plus rien...

*Mais...où suis-je ? *
- héhé bonsoir ma jeune amie !!
*...qui vous êtes, vous ?*
- Moi ? Et bien, je n'ai pas de nom. Je suis en quelque sorte l'être que tous peuvent voir avant de passer dans l'autre monde...et donc, comme tu es morte, tu dois me suivre, et je...
*...qu...que dites-vous ??*
- Non, pitié, ne me force pas à répéter ce que je viens de dire, je commence à en avoir assez de prononcer cette phrase T_T
*Vous vous foutez de moi ou quoi ? Je ne peux pas mourir maintenant...il faut que je retrouve Inki et que...*
- Ah non ! Pas encore ! Cela ferait la deuxième fois en moins d'une semaine !
*...Ce n'est pas mon problème.*
- Juste. J'aime ta manière de parler. Bon, écoute, je veux bien te laisser en vie pour le moment, mais, à une seule condition...(bon, je sais que je risque de me faire virer par mes supérieurs, mais bon)
*Laquelle ?*
- Donne-moi la vie d'un autre en échange de la tienne...

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La première chose à laquelle elle fit attention en reprenant conscience était la présence d'une espèce de liquide chaud et épais qui coulait depuis son ventre, jusqu'au bas de ses cuisses.

*Du sang ? ...mon sang ?*

Elle souffrait tellement qu'elle n'aurait réussi à deviner la douleur reçue par une éventuelle blessure au ventre.
Ah...oui, elle comprenait à présent, c'était le coup de grâce que lui avait porté le garçon de tout à l'heure, celui qui l'avait fait rencontrer cet étrange individu chargé d'emmener les âmes loin de la terre.
Elle ouvrit les yeux. Une, deux, trois secondes passèrent...

- ...I...Inki ?

Il l'avait retrouvée, elle sentait son énergie. Comme elle aurait souhaité pouvoir le voir en cet instant.
plic, une petite goutte lui était tombée sur le bras. Il pleuvait ?

Un sourire s'était formé sur ses lèvres... Inki souffrait, c'était évident mais... il ne pouvait s'empêcher de sourire. Des gouttes de sang, telles de fines perles, s'écoulaient d'abord doucement, puis plus vite, comme de l'eau qu'on libère. Un flot rouge s'échappait du ventre du Valkyrie. Une lame, la lame de Kay, s'était enfoncée dans sa chaire, l'avait traversée, et avait même frôlé le ventre de Haru, qui se trouvait juste en dessous du garçon. Celui-ci, dans une tentative désespérée, avait réussi à s'interposer entre elle et le Démon... juste à temps...

Un fillet de sang s'échappa de la lèvre du Yauwn. Pas de sourire, pas de rire, juste... de la surprise. Dans son ventre... une lame. La lame d'une lance. Il ne comprenait plus rien. Regardant droit devant lui, il cru voire son père. Une simple halucination...

La lance du Valkyrie dans le ventre du Démon. L'épée du Démon dans celui du Valkyrie. Et derrière, la jeune Elfe, pétrifiée. Ce moment parrut interminable pour tous les trois. Mais le premier à céder fut Kay.
Son regard se vida, se libéra de toute expression. Il avait agrippé le manche de la lance de ses deux mains pour la retirer, mais rien à faire. Il bascula en arrière. Sa tête toucha le sol, et il resta là, étendu et immobile.

Inki, lui, réussit dans un ultime effort à sortir la lame de son ventre et à la jetter plus loin. Il se tourna vers Haru, toujours en souriant. Son sourire était serein, sans ironisme ni arrogance, et son regard doux et bienveillant.

-Haru... je...

Sans le vouloir, il bascula en avant. L'Elfe le rattrapa de justesse, et leurs têtes se trouvaient à présent à quelques centimètres seulement l'une de l'autre.

-Je... je suis heureux de t'avoir retrouvée... saine et sauf...

Il ferma les yeux. Il était extrêmement fatigué, tout à coup. Il allait dormir un peu, avant de pouvoir continuer son voyage avec Haru. Il allait tout reprendre comme avant. Mais avant, il allait dormir. Tout s'effaça. Et il s'endormit, dans les bras de celle qu'il aimait, le sourire aux lèvres...

Une goutte tomba, celle-ci se mélangea à la flaque de sang qui s'était formée en dessous des deux jeunes créatures. Elle fit remuer la surface du liquide rougeâtre et finit par disparaitre en lui. Mais il ne s'agissait pas là d'une nouvelle goutte de sang...

Haru pleurait.
Pleurait de ses yeux aveugles.
Pleurait comme elle n'avait jamais pleuré.
Pleurait comme si sa propre vie en dépendait.
Pleurait comme s'il elle n'arrivait plus à s'arrêter.
Pleurait de mal.
Pleurait de peur.
Pleurait de soulagement.
Pleurait par tristesse.
Pleurait par amour.

Elle sentait le corps de son aimé posé sur elle. Ses vêtements étaient aussi déchirés qu'ensanglantés et sa peau, couverte de blessures, était devenue si froide que cela en devenait plus qu'inquiétant.

- Inki...pourquoi ? Pourquoi es-tu revenu ? Pourquoi as-tu risqué ta vie pour celle qui n'a réussi qu'à te tromper et te mentir ?

Elle prononça ces paroles aussi faiblement que si elle était elle-même occupée à s'éteindre.
La jeune fille avait prit Inki dans ses bras et ses chaudes larmes venaient mouiller les cheveux noirs du Valkyrie.
Inki n'entendait pas ce qu'elle disait, et peut-être était-ce mieux ainsi.

- Merci Inki, pour tout ce que tu as fait pour moi. Grâce à toi j'ai changé, je n'étais qu'une égoïste et l'avis des autres m'importait peu.
Mais toi,...toi tu n'étais pas comme ça. Même si cela ne te plaisait pas, tu as accepté de t'en aller sauver tes parents. Tu n'as pas fait cela par intérêt...tu es généreux Inki...très généreux...même si tu ne t'en rends pas compte.
Tu m'as ouvert les yeux...tu as accepté de me pardonner...tu as apporté un sens à ma vie, une chose pour laquelle il me faut rester sur Terre. Et c'est pour toutes ces choses, que je te remercie, Inki, de tout mon coeur...

Elle ferma les yeux et lentement, ses mains furent entourées d'une faible lumière bleue.

*Ne meurs pas...reste avec moi...*

La blessure au ventre du garçon commençait à se refermer, pas trop, mais juste assez pour qu'il ne puisse mourir d'hémorragie.
Malheureusement, elle ne pouvait faire plus pour lui, c'était tout ce qu'elle avait appris quand elle était encore dans l'armée.

Il y avait, au loin, une forte lumière. Une lumière, tellement dense qu'on arrivait à distinguer les alentours aussi bien que dans le noir total. Aveuglé, Inki se protégea les yeux de ses bras. Il était dans une espèce de tunnel, dont on ne distinguait ni le début, ni la fin. Où était-il ? Où était passé Haru ? Et puis, qu'était cette étrange sensation qui l'obligeait à avancer vers la lumière ?
Le Valkyrie marchait, toujours tout droit. Au fur et à mesure qu'il avançait, il avait l'impression qu'on le suivait. Et puis... qu'était ce son qu'il entendait, de plus en plus fort ? Ce n'est que quelques instant après qu'il reconnu des voix. Pas n'importe quelles voix : la sienne, celle de Haru, de Night, de ses parents,...
Pris au dépourvu, il voulut appeller à l'aire, appeller les personnes à qui appartenaient ces voix, mais... il ne sut produire aucun son. Il porta la main à sa gorge, et remarqua que ses doigts était étrangement blancs. Les voix étaient à présent de plus en plus forte, et le Valkyrie ne put s'empêcher de plaquer les mains contre ses oreilles.

-Il est mort ?
-Non, Night, il va très bien. Il doit avoir le même âge que toi. Je suis sûr que vous deviendrez de grands amis, plus tard.
-... Ah bon...

Plaquant ses mains plus fort, il commençait à avoir mal à la tête. Il avait compris. On raconte que, quand on meurt, on voit sa vie défiler devant soi. C'est ce qui était en train de se passer. Le Valkyrie refusait de voir, aussi ferma-t-il les yeux, les mains collées à ses oreilles.

-En fait... je ne sais pas comment ça se fait, mais c’est comme si j’avais du feu en moi... Quand il pleut, le feu ne brûle plus et donc j’ai froid. Par contre quand il ne pleut pas, le feu brûle sans arrêt et j’ai chaud... Voilà pourquoi je porte des vêtements légers !
- ...Tu te fous de moi ou quoi ? Tu crois que je vais avaler ça ?

Il fallait que ça s'arrête. Mais, les scènes continuaient, de plus en plus récentes. Il revit le Démon qui avait tenté de tuer Haru. Ce qu'il venait de se passer il y a quelques minutes. Ca y était, il allait mourir. La lumière s'évanouit soudain. Le Valkyrie sentit une forte douleur lui traverser les côtes. Tout disparut. Plus rien.

*Suis-je mort ?*

Méfiant, il tenta d'ouvrir les yeux. Il n'était plus debout, il était couché, étandu sur le dos dans l'herbe humide. Les yeux mi-clos, il essaya de distinguer la lumière, le tunnel, n'importe quoi qui lui certifirait qu'il n'était pas encore mort. Mais ce fut bien plus qu'un couloir qu'il apperçu à travers l'ouverture de ses paupières. Au dessus de lui se tenait une femme. Il était mort, et cette jeune fille était venue l'accueillir au paradis. Il tenta de se redresser légèrement, mais une atroce douleur le figea sur place. De la douleur... Il ne pouvait pas être mort.

-Je suis... en vie ?

C'est seulement à ce moment qu'il reconnut la jeune femme. La jeune Elfe rousse.

-Haru ?

Le ciel était clair à présent. Il n'y avait ni vent, ni nuages, ni oiseaux, ni quoi que ce soit d'autre. Le ciel était vide, tellement vide. Il était...exactement comme son regard. Vide d'expression. Vide de vie.

Elle avait posé la tête du Valkyrie sur ses genoux tachés par le sang, et avait levé la tête vers les cieux...semblant vouloir y apercevoir une quelconque lueur d'espoir. Mais elle ne voyait rien...évidemment...

Le silence regnait sur la Forêt Noire...jusqu'à ce que...

- Haru ?

Inki...oui c'était bien sa voix. Elle la reconnaîtrait entre mille, cette voix qui avait gardé un léger air gamin, malgré son âge. Cette voix qui l'avait mise en colère tant de fois, qui l'avait fait pleurer et qui avait même réussi à la faire sourire.

Quand elle entendit son prénom, elle ne put empêcher ses yeux de pleurer. Une larme coula le long de sa joue et finit par retomber sur celle d'Inki.
Elle n'arrivait pas à ouvrir la bouche, comme si la moindre parole de sa part aurait le moyen d'effacer ce moment à tout jamais.

Elle baissa la tête et dans un silence absolu, elle posa sa main blanche sur la joue légèrement mouillée du garçon.

- Inki ? demanda-t-elle à son tour

Le Valkyrie ne put s'empêcher de sourire. Pour la première fois depuis bien longtemps, il se sentait vraiment bien. Il était là, couché dans les bras de son aimée. Il n'avait plus mal du tout, au contraire, une sensation de bonheur l'envahissait dans tout son corps. Il avait fermé les yeux, mais uniquement pour mieux apprécier ce moment intense. Il se doutait qu'elle avait fait pareil. Après tout, pourquoi resterait-elle à le regarder, lui, dont le vêtement était plus rouge que noir à présent ?

Il ouvrit alors les yeux, lentement, afin de plonger son regard dans le sien. Mais il fut surpris de constater qu'il le trouvait étrangement vide d'expression, d'émotion. Il préféra ne pas se poser trop de questions. Il s'en voudrait trop de gâcher ce moment. Il attira Haru vers lui, lentement, afin d'approcher son visage du sien, mais finit pas hésiter. Et si elle ne voulait pas qu'il lui pardonne ? Elle risquait de le détester, à son tour. Et il ne voulait pas la perdre, jamais de la vie. Trop de choses s'étaient passées pour tout briser comme ça. C'était malheureusement trop facile de briser un lien, même si celui-ci avait prit des années à être construit. Il sentit en peu de temps la tension monter. Il profita de ce silence pour la contempler, il la trouvait encore plus belle qu’avant. Puis, il finit par prendre son courage à deux mains. Il était temps pour lui de prendre un nouveau départ dans sa vie, cela fait maintenant plusieurs lunes qu’il avait prit sa décision. Il y a un début à tout. Une fin à tout aussi, mais celle-là ne risquait pas d’arriver de si tôt, pas tant qu’il serait auprès d’elle.

-Haru, je...

Une boule vint lui boucher la gorge, alors qu’il sentit une désagréable sensation de chaleur l’envahir. Après quelques secondes d’hésitation, il finit pas prendre son courage à deux mains. Il murmura, comme pour lui-même, une phrase que la jeune Elfe put à peine entendre.

-Je... je t’aime, Haru.

Alalah...quel monde complètement absurde nous avons là. Un monde tellement absurde que je m'y perds moi-même. Rien n'est censé...rien n'est logique.

Alalah...si seulement tout pouvait être plus simple ! Il n'y aurais plus de malheurs, plus de problèmes, plus de questions.
Mais en fin de compte, les questions sont trop importante à notre avenir pour qu'on puisse oser les laisser de côté.

Les questions sont notre oxygène, notre raison de poursuivre notre chemin de vie. Elles sont à l'origine de toutes créations. Elles sont nos bases. Sans elles nous ne sommes rien.

Alalah...quel monde complètement absurde nous avons là.

- C'est...absurde...pourquoi ? Dis-moi...que cherches-tu à aimer une personne comme moi ? Moi je n'ai...jamais réussi qu'à... te détruire...aussi physiquement que moralement. Je...je ne mérite pas que quelqu'un puisse me regarder. Je suis abjecte !! C'est absurde !!! Totalement absurde !!!!!!!!!!!

La jeune fille se remit rapidement sur ses deux jambes et ses mit à s'éloigner presque au pas de course.

- Vas-t'en !! Laisse-moi !! Oublie-moi !!

En s'enfuyant, elle laissa derrière elle ce pour quoi elle avait tenu le coup jusqu'à présent. Elle ne garda en elle que quelques larmes ainsi que la surprise de cette déclaration.

- Tu mérites beaucoup mieux que ça !!

Le sol fut alors mouillé des larmes versées par la jeune fille, et le ciel ayant décidé de l'imiter, se mit à verser ses propres larmes.
Il pleuvait à présent. Il pleuvait tellement fort.

Un peu sur le coup de la réaction inattendue de la jeune Elfe, Inki n'avait qu'une envie : bondir sur ses pieds et la rattraper. Il tenta de se redresser le plus vite possible, mais, à peine s'était-il assis qu'il avait déjà l'impression d'avoir reçu une nouvelle lame dans son ventre. Crachotant un peu de sang, il préféra ignorer la douleur, et continua à se redresser tant bien que mal. Mais, une fois debout, il s'étala en avant avant d'avoir pu faire un pas. Une goutte parcourut sa joue, il ne sut dire si c'était la sienne ou une simple goutte de pluie. Étandu sur le ventre, le visage contre terre, il s'en voulait attrocémment de ne pas pouvoir la rattraper. Furieux, il donna un coup point sur le sol et tenta une nouvelle fois de se relever... sans succès.

-Je... non... C'est... dégueu...

Là, une idée lui traversa alors l'esprit.


La jeune Elfe avait recommencé à courir, le plus loin qu'elle pouvait. La pluie se fit de pluis en plus forte. Soudain, une masse sombre passa au dessus d'elle, cachant le peu de lumière qui émanait du soleil. Cette forme, telle un rapace, fonça soudain droit vers la jeune fille... et s'écrasa sur elle. Elle n'eut pas le temps de faire quoi que se soit (d'ailleur, elle ne savait plus trop bouger) qu'une voix lui chuchota quelques mots à l'oreille.

-Où comptes-tu partir comme ça ? Je... C'est tellement horrible de te faire aimer par un imbécile comme moi ?

L'objet volant non-identifié n'étant autre qu'Inki, Haru ne sut pas quoi répondre. Le Valkyrie, lui, était un peu embarassé : il était étendu sur elle de tout son poids et devait l'empêcher de respirer mais, son visage étant juste en dessous du sien... Il essaya de sourire, malgré la douleur qui était toujours présente.

-Haru... C'est uniquement si tu pars que tu me détruira. Je sais que tu as changé, et je t'aime...

Sur ce, il approcha doucement son visage du sien, pour poser ses lèvres sur les siennes. Libre à elle de le repousser, il ne la forçait pas. Pourtant, il avait tellement envie qu'elle l'accepte, elle aussi...

Son visage était à peine à quelques centimètres, maintenant milimètres, d'elle et elle n'arrivait toujours pas à le voir malgrés cela.

Elle avait bien entendu ce qu'il lui avait dit, mais n'arrivait cependant pas à y croire, cela semblait tellement iréel...
Ses yeux se noyaient dans ses propres larmes à présent, et il était vrai qu'Inki l'empêchait légèrement de respirer dans cette position.

Mais...après tout, cela n'avait plus d'importance.

- Tu...es trop gentil...fit-elle faiblement en passant ses mains dans les cheveux noirs du Valkyrie.

"Je t'aime", c'était la deuxième fois qu'elle entendait cette phrase sortir de sa bouche. Et c'était la deuxième fois qu'elle sentait son coeur battre tellement fort qu'elle aurait cru qu'il allait exploser en elle.

Mais qu'avait-elle fait pour mériter de telles paroles ? Peut-être était-ce parce qu'elle était simplement jolie, ou que son physique attirait les regards de beaucoup d'hommes.
Non...s'il l'aimait réellement, ce n'était pas pour ce qu'elle avait, mais bien pour ce qu'elle était vraiment.

C'était la première fois qu'elle entendait ces paroles résonner si naturellement, si profondément. Que même si elle ne cessait de se répéter que cela ne pouvait être possible, elle ne pouvait faire autrement que de le croire.

Inki aussi avait fortement changé, tout en lui était différent. Il paraissait être plus sûr de lui, et semblait avoir fortement muri. Et non, ce n'était plus un simple gamin qu'il fallait à tout prit protéger pour le maintenir en vie. Ces temps étaient révolus.

Et c'est entre deux sanglots qu'elle lui dit ce qui lui pesait depuis trop longtemps...

- Moi...moi aussi je t'aime, Inki...

Elle ferma les yeux et leva légèrement la tête pour déposer un baiser sur ses lèvres.

De nombreux éclairs s'étaient mis à déchirer le ciel, et celui-ci continuait encore et toujours à pleurer.

Le temps aurait pu s'être arrêté, ça aurait été pareil. Nul ne saurait dire combien de minutes s'étaient écoulées depuis que la jeune Elfe avait prononcé cette phrase tant attendue, inespérée même. Même si une certitude avait envahi le jeune Yoru, le fait d'entendre ces simples mots faisait battre son coeur trois fois plus vite. Alors, tout cela n'avait pas été vain.
Après une baiser qui parut interminable, mais si agréable à la fois, le Valkyrie tenta de replonger ses yeux dans ceux de son aimée. Mais, rien à faire, quelque chose clochait. Il décida de se dégager d'elle, puis lui tendit la main pour l'aider à se relever. Seulement, elle l'ignora et se releva d'elle-même.

-... Haru...

Non, décidément, Inki ne voulait pas gâcher ce moment. Haru avait un problème, mais ce n'était pas important. De toute façon, quoi qu'il arrive, il l'aimerait toujours autant. Il l'attira vers elle pour la serrer dans ses bras avant qu'elle n'ai pu répondre à son début d'interrogation.

-Haru, il faut que tu me promette une chose. J'aimerais d'abord savoir... Fais-tu toujours partie de l'armée ?

Il crut la voir hocher la tête en signe de négation, et laissa échapper un petit sourire. Puis, il prit son inspiration et continua :

-Je... Il y a une chose que je ne veux pas voir se produire. Je ne veux pas qu'on soit séparés. Alors, si tu as une quelconque mission, parle-moi, et j'essayerai de t'aider, je viendrai avec toi...

Le tonnerre grondait, si bien qu'on eut l'impression que le ciel lui-même s'opposait à l'union de ces deux créatures, si différentes l'une de l'autre...

Elle se sentait si bien à présent. Et même si elle était toujours aveugle, cela ne l'empêchait pas de ressentir un profond sentiment de bonheur. Tout allait aller beaucoup mieux, à partir de cet instant, elle en était certaine. Même s'ils avaient tout deux de nombreuses blessures, et que le fait qu'Inki tiennent encore debout était miraculeux.

- ...t'es trop gentil, Inki, décidemment, fit-elle en le serrant un peu plus fort dans ses bras, mais la seule chose dont j'aurais besoin venant de toi, c'est que tu me promettes que, quoi qu'il arrive, tu resteras toujours auprès de moi !

Et sans le laisser répondre à sa phrase, elle continua...

- Il faut absolument que je te le dise, maintenant. Tu dois sans doute avoir déjà remarqué, mais...depuis quelque temps déjà, mes yeux ne...enfin, je veux dire que j'ai perdu la vue... je ne sais pas trop comment cela est arrivé.

Comme elle aurait aimé pouvoir voir le visage qu'affichait le Valkyrie à ce moment précis. Cela l'aurait évité de devoir supporter de suspens qui pesait sur ses épaules.
Était-il ennuyé ? Triste ? Choqué ? Elle n'en savait rien et c'est justement cela qui l'inquiétait.

- Inki...dis-moi, décris-moi l'expression actuelle de ton visage.

Inki ne savait que répondre. Il avait certes eu quelques soupçons sur les yeux de son amour... mais il ne s'attendait pas à ça. Il était choqué, bien évidement, mais il ne voulait rien lui dire, il ne voulait pas la blesser.
Mais, si Haru restait aveugle, comment faire pour vivre comme avant ? Comment faire... pour mener une vie normale ? Un peu apeuré, le Valkyrie jeta des coups d'oeil de droite à gauche, comme pour chercher une échappatoire. Puis, il tenta de se calmer et de remettre ses pensées au clair.
Dans un couple amoureux où l'un des deux conjoints venait à perdre la vue, l'autre finit toujours par abandonner, perdre espoir et le laisser tomber. C'est comme ça. La cécité fait... tellement peur, car elle est trop dure à assumer, trop dure à gérer. Mais Inki, lui, n'est pas de ces lâches, qui fuyent dès que survint un problème. En tout cas, il ne voulait pas le croire. Si Haru était aveugle, il ferait avec. Au lieu de l'emmener se promener pour admirer le paysage, ils promèneraient pour se retrouver seuls à deux, sentir le parfum de la forêt et écouter le chant des oiseaux.
Oui, Inki s'était convaincu de ça... mais malgré tout, un léger sentiment de panique subsistait au plus profond de lui-même.

Le jeune Valkyrie s'adoucit alors, et, après un long silence, il finit par murmurer aux oreilles de l'Elfe.

-J'ai peur, Haru. Peur que tu croies que je te laisserai tomber. Car même le plus dangereux des obstacles ne me séparera plus de toi.

La panique complètement dissipée, il sourit, et colla la jeune fille contre lui plus fort encore.

-Là, je souris. Je pense à l'avenir qui nous est réservé, et je ne peux m'empêcher de le voir heureux pour tous les deux.

C'est à ce moment que, comme si les mots du garçon avaient appaisés l'atmosphère, le ciel se calma. Le tonnerre cessa et, entre le tapis de nuage qui le recouvrait, le soleil commençait à faire pénétrer quelques faibles rayons sur la terre...

C'est dans un silence complet qu'elle s'était mise à écouter attentivement chaques paroles prononcées par le jeune Valkyrie. Les yeux clos, le visage relevé vers le ciel, son visage commencait petit à petit à traduire un pronfond sentiment de sérénité. Le ciel était bleu à présent, et les oiseaux s'étaient mis à chanter à nouveau. Plusieurs minutes s'étaient écoulées depuis qu' Inki avait cessé de parler, toutes plus silencieuses les unes que les autres.

- ...C'est...c'est génial !!! Continue alors !!!

Elle posa son visage contre le torse de son aimé et un grand sourir se mit à briller sur son beau visage. À quand remontait la dernière fois qu'elle avait sourit comme cela ? Si l'on ne tient pas compte de ses vies antérieures, on ne pourrait pas répondre à cette question.
Et puis, sans s'arrêter de sourir, elle le prit par la main et commença à s'éloigner. Quand il lui demanda où est-ce qu'ils se rendaient, elle lui répondit en retour qu'elle n'en était pas certaine...

- Mais je sais juste, qu'à partir de maintenant, toi et moi nous nous dirigeons vers notre avenir. L'avenir que tu réussis à voir, et celui que je me contente d'imaginer du mieux que je peux.

C'est ainsi qu'ils s'en allèrent, laissant la Forêt Noire charmée par le chant des oiseaux derrière eux. Peu importait à présent ce qui aurait pu leur arriver. Ils étaient ensemble, et cela les suffisait amplement.

- Je t'aime Ink...je t'aime tellement...merci...